4.1.24

Chroniques de Décembre 2023

par Georges Charles

Dimanche 3 Décembre

Les exodes de masse ; 1ère partie, les Arméniens du Haut- Karabakh, les Ukrainiens, les Européens d’Algérie, les Grecs d’Anatolie

Bousculés par des événements historiques, des populationsentières sont contraintes de quitter leur terre d' origine, sans espoir de retour.

L’exemple le plus récent, celui des Arméniens du Haut-Karabakh. Berceau de l’Arménie historique, ce territoire d’environ 4 400 km², peuplé à plus de 90 % d’Arméniens, enclavé dans l’Azerbaïdjan, avait été rattaché à cette république pendant la période soviétique. En 1991, le Haut-Karabakh proclamait son indépendance ; la guerre éclatait entre les sécessionnistes arméniens et l’armée azérie, de 1991 à 1994, en 2016, en 2020.

En septembre dernier, après un blocus de plusieurs mois,l’Azerbaïdjan lançait une opération militaire, rapi ment victorieuse. La population arménienne du Haut-Karabakh décidait alors de quitter l’enclave pour se réfugier en République d’Arménie ; en quelques jours, 100 000 exilés, sur une population de 120 000.

Des réfugiés sur la route du corridor de Latchine, vers l’Arménie

Le cas de l’Ukraine est particulier, car la plupart des déplacés, suite à l’invasion russe de février 2022, gardent un tout petit espoir de pouvoir, un jour, " rentrer chez eux ". Ceux qui avaient changé de région à l’intérieur de l’Ukraine l’ont fait, en majorité ; par contre, environ 7 millions de personnes ont quitté temporairement l’Ukraine, dont 2 millions en Russie et la majorité vers l’Ouest, notamment en Pologne (1,6 millions), en Allemagne (1 million), en Tchéquie (500 000) et 120 000 en France. Pour eux, le retour est tout, sauf garanti.

En France, le dernier exode de masse a été celui des Européens d’Algérie, durant l’été 1962 : 800 000 rapatriés sont arrivés en métropole.

 En matière de déracinement sans espoir de retour, l’Europe du XXe siècle en a connu d’autres. Trois exemples : l’exode des Grecs d’Anatolie en 1922, l’exode des Allemands de Tchécoslovaquie et de Pologne en 1945. Ces déplacements de population forcés se déroulaient loin de nous, à une époque où les médias étaient limités et avaient d’autres priorités : en 1945, on s’intéressait plus, à juste titre, à la chute du IIIe Reich et à la découverte des camps d’extermination. Qui, en Europe, allait pleurer sur le sort des Allemands expulsés de pays où ils vivaient depuis le Moyen Âge ?

L’exode des Grecs d’Anatolie

Les Grecs l’appellent " La Grande Catastrophe ". En 1920, l’Empire ottoman, vaincu après la Première guerre mondiale, avait cédé au royaume grec des territoires en Anatolie et en Thrace orientale. Les nationalistes turcs, dirigés par Mustafa Kemal, n’avaient pas accepté cette décision imposée par les Alliés ; ils lancèrent une offensive militaire qui se termina par leur victoire. La Grèce devait abandonner l’ensemble de ses gains territoriaux de 1920, sauf les îles de la mer Égée. En quelques mois, s’effectuait un dramatique " échange " de populations entre les deux pays : 1 500 000 chrétiens grecs d’Anatolie et de Thrace orientale, qui y vivaient depuis l’Antiquité, étaient expulsés et se réfugiaient en Grèce, tandis que 500 000 musulmans de Macédoine et d’Épire devaient quitter la Grèce et s’installer en Turquie.

Enfants grecs et arméniens, réfugiésà Athènes en 1923

Lors du recensement de 1928 en Grèce, 1,22 million de réfugiés avaient été enregistrés, soit le cinquième de la population nationale.


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