6.12.12

Chroniques de Novembre 2012

Par Georges Charles

Jeudi 1er Novembre

De retour d’un séjour d’amitié et de découverte de la peinture. Ah, j’en ai appris avec Michel et Chantal, dont la culture en ce domaine a contrasté avec mes lacunes !

De notre base d’Opoul, Pyrénées-Orientales, nous partons au gré des routes du Corbièristan; nous croisons Cucugnan, Peyrepertuse et Quéribus ; nous descendons en Conflent jusqu’à Prades. Plus tard, Céret, la " Mecque du cubisme ", en Vallespir.

Juan Gris a résidé à Céret en 1913, en compagnie d’autres peintres venus de Montmartre, Pablo Picasso, Georges Braque, Max Jacob notamment.


 

C’est l’histoire d’un mec qui redécouvre le cubisme, un siècle après. Dans le prolongement de la rue de la Tramontane, à Opoul, la lumière du matin, franche et impérieuse comme une lame, dessine en figures géométriques fraîches, tranches, lamelles, angles aigus et bords coupants,ce qui, en réalité, est plutôt rond et chaud. Relief de crêtes et de pignons, de tuiles et de gouttières aux imbrications compliquées ; perspective mise en plat ; couleurs minérales vertes, bleues, jaunes et rouges.

Ici, naïvement, sous l’effet d’une révélation où les maisons d’Opoul rappellent celles de Céret peintes par Juan Gris, j’ai le sentiment d’entrer dans une compréhension intuitive du cubisme. S’intéresser à ce style de peinture, toute une histoire, que je compte bien parcourir dans les chroniques à venir. Programme d’autant plus attrayant qu’il révélera le lien entre cubisme et Afrique, entre Afrique et jazz.

Le cubisme est la peinture du début du XXe siècle ; le jazz be-bop est la musique du milieu de ce même siècle. Pablo Picasso / Juan Gris / Georges Braque d’un côté ; Charlie Parker / Miles Davis / Thelonius Monk de l’autre. Mêmes combats, mêmes ruptures.

Nous résidons dans une maison d’artiste peintre où il ne faut pas négliger les travaux qui en garantiront la pérennité. Je viens de décrocher un contrat : participer à la réfection du toit de la maison de Michel, au printemps prochain. J’aime ma nouvelle manie de laisser une trace de mon travail dans diverses maisons, en Provence, Comminges, Roussillon ou Malepère (ouest de Carcassonne).

Les événements se sont succédé ici. Concours de blanquette de veau au restaurant Le lézard. Les convives sont invités à noter, de 1 à 5. Imprévue ? La libération de notre potentiel personnel par une charmeuse, une chamane, une diseuse de bonne aventure. Avec la date de naissance et une combinaison de chiffres interprétée selon un calendrier maya. Nous ne sommes pas loin de Bugarach et de la fin du monde, prévue le 20 décembre 2012…

Je voudrai retenir de ses propos : « prends soin de ton corps, il t’accompagne sur ta route, tu as encore besoin de lui ! », ou encore : « réponds à tes questions ! » Grâce à elle et à ma réincarnation en " guerrier de cristal ", j’ai plongé dans une perplexité joyeuse.

Après ces escapades, retour à ma base. L’appartement du boulevard des Minimes est semblable à la base d’un appareil téléphonique sans fil, dont je serais le combiné. Ce soir, le souvenir du Canigou enneigé s’estompe devant les milles et une lumières de Toulouse. Les clochers de Saint Sernin et des Jacobins, voilà des pics incandescents qui valent bien les cimes blanches ! Même la cheminée de l’usine d’incinération s’y met : elle crache des volutes de brume qui partent à la recherche de sommets où s’accrocher.

Un roman passionnant



Je voudrais vous faire partager mon coup de coeur pour le roman du jeune écrivain suisse Joël Dicker, "La vérité sur l'Affaire Harry Quebert", prix Goncourt des lycéens 2012 et grand prix du roman de l'Académie française.

30 août 1975, à Aurora, dans le New Hampshire, une femme croit apercevoir une jeune fille, poursuivie par un homme, à l'orée de la forêt proche de sa maison d'habitation. Elle appelle la police ... Ce témoin est retrouvé, tué d'une balle dans la poitrine. 
Au même moment, une jeune fille de quinze ans, Nola Kellergan est signalée disparue. La police fait le lien entre les deux affaires. Mais l'enquête n'aboutit pas. Nola n'est pas retrouvée, l'assassin du témoin non plus.
Eté 2008, trente-trois ans plus tard, le squelette d'une jeune fille, qui sera expertisé comme celui de Nola, est déterré à proximité de la maison de Harry Quebert, professeur d'université et  écrivain qui a connu son heure de gloire en 1975. Celui-ci est accusé du meurtre ...
Marcus Goldman, lui même jeune écrivain à succès, ami et ancien élève de Harry, mène sa propre enquête. Il remonte le temps et retrouve peu à peu les acteurs de cet été 1975.
Tous sont liés par l'amour, l'amitié mais aussi par la jalousie, la haine, le remord, l'usurpation ... L'occasion de dresser un état des lieux de la société américaine de l'époque et même contemporaine. A signaler que la couverture du livre est une reproduction d'un tableau d'Edward Hopper.

La forme du roman est également intéressante, car il s'agit d'un livre dans le livre, car au delà de l'enquête policière en elle-même, Joël Dicker s'interroge sur la place et le rôle de l'écrivain et le sens à donner à l'écriture.

Les chroniqueurs et les critiques littéraires sont unanimes, certains voyaient déjà Joël Dicker, lauréat du Prix Goncourt.

Un formidable roman qui nous tient en haleine pendant plus de 660 pages !