par Georges Charles
Samedi 1er décembre
La loi du genre : 37e partie ; la féminisation des noms de métiers et de fonctions, des titres et des grades
La féminisation des noms de métiers et de fonctions, des titres et des grades, est un des changements les plus rapides et les plus étendus qu’ait connu notre langue.
On hésite parfois sur la forme à donner à cette féminisation. C’est le cas en particulier pour les noms dont le suffixe (élément ajouté après le radical d’un mot pour former un dérivé de ce mot) est en " eur " au masculin.
Féminins en " euse " : lorsque le nom correspond à un verbe et partage le même radical que le participe présent du verbe. Exemples : danser → dansant → danseur → danseuse ; bâtir → bâtissant → bâtisseur → bâtisseuse. Ce procédé vaut aussi pour des noms en " teur " issus de verbes dont le radical se termine par " t ". Exemples : chanter → chantant → chanteur → chanteuse ; acheter → achetant → acheteur → acheteuse.
Féminins en " trice " : plusieurs noms masculins en " teur " ont pour féminin un nom en " trice ". Exemples : agriculteur (pas de verbe de même radical) → agricultrice ; sénateur → sénatrice. Proche des féminins en " trice ", citons ambassadrice, le féminin d’ambassadeur ; le mot ambassadrice a longtemps désigné l’épouse de l’homme exerçant la fonction d’ambassadeur ; demain, c’est peut-être le mari de l’ambassadrice qui distribuera des Ferrero Rocher… et si l’ambassadrice est mariée à une femme, quel nom choisira-t-on pour cette dernière ?
Féminins en " eure " ou en " euse " : d’autres noms masculins en " eur " n’appartiennent pas aux catégories précédentes. On propose d’employer soit une forme épicène (la même au masculin et au féminin), soit une forme en " eure ". Exemples : un professeur → une professeur ou une professeure ; ingénieur → une ingénieur ou une ingénieure.
Pour le mot masculin docteur, le féminin doctoresse, qui a été utilisé parfois pour qualifier la femme d’un docteur, désigne aussi une femme qui pratique la médecine, notamment en Suisse et en Belgique(1). En France, on dit aussi une docteur ou une docteure.
La limite de ces " innovations ", c’est leur caractère aléatoire : quand on veut féminiser la fonction d’auteur, faut-il dire une auteure, une auteuse, une autrice ?
Assemblée générale à Vincennes, Paris 8 Saint Denis, occupée, au printemps dernier
Dans les années 1920, d’éminents linguistes s’offusquaient que des femmes osent désormais se faire appeler " madame l’avocat ".
Madame, suivi du masculin, quel crime ! Alors que le mot se féminise sans problème, avocate ! Faut-il dire " maîtresse " lorsqu’on s’adresse à une avocate ? J’ai essayé avec certaines professionnelles du tribunal d’assises de Toulouse ; j’ai fait un bide…
Les combats contre la féminisation de ce vocabulaire sont violents lorsqu’il s’agit de fonctions de prestige : président, ministre, directeur… car ces fonctions ont été longtemps chasse gardée des hommes. Pour la première fois en 1936, des femmes étaient nommées sous-secrétaires d’État ; première femme ministre en 1947 ; première préfète nommée sous Mitterrand. Par contre, la féminisation des noms de fonctions subalternes est acceptée sans polémique : caissière, vendeuse, cuisinière, aide-ménagère…
Pour conclure : certaines femmes continuent de penser que l’usage du féminin pour qualifier leur métier, fonction ou titre, les dévalorise. C’est pourquoi des écrivaines maintiennent qu’elles sont des écrivains et qu’Hélène Carrère d’Encausse est toujours secrétaire perpétuel de l’Académie française.
(1) Dans la francophonie, au Canada, en Belgique et en Suisse notamment, la féminisation des noms de métier ne semble pas poser de problème.
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